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Interview Guy Millière. Partie II. Mai 2005 |
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Dans cette seconde partie, Guy Millière persiste et signe: Europe, Turquie, Islam, Israël, Politique étrangère américaine... Et en bouquet final assez jubilatoire: MRAP et islamo-gauchisme. |
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II ème Partie
Libertyvox: Vous avez déclaré être favorable à l’entrée de la
Turquie dans l’Europe. J’avoue avoir du mal à comprendre la logique de
vos arguments. Pouvez-vous nous éclairer?
Guy Millière: J’ai dit plus haut pourquoi la Turquie devait être
arrimée à l’Occident et pourquoi l’Occident devait être ouvert à la
Turquie. Je me suis situé dans la perspective: la Civilisation et ses
ennemis. J’ai laissé volontairement de côté la question de l’entrée de
la Turquie en Europe: militairement la Turquie est en Occident car elle
est dans l’Otan, économiquement, elle est en Occident aussi et elle le
sera toujours davantage, politiquement, elle est bien plus proche de la
Civilisation que bien des pays qu’on critique pourtant moins en Europe.
L’entrée de la Turquie dans une Europe politique pourrait changer
certains rapports de force, c’est certain, mais je pense que l’Europe
politique ne se fera pas, que la Constitution européenne ne sera jamais
promulguée et qu’on reviendra assez vite à des raisonnements en termes
de planète et de civilisation. L’union politique européenne est une
vieille idée obsolète, sous-tendue par le désir de certains de peser
face aux Etats-Unis, de rivaliser avec les Etats-Unis, voire de contrer
les Etats-Unis. Ces désirs ne font pas sens en un temps où il faut
adopter une pensée planétaire. Ces désirs me semblent même dangereux au
sens où l’Europe est un ensemble vieillissant, déclinant économiquement
et financièrement, incapable d’assurer sa défense de façon crédible:
détacher l’Europe des Etats-Unis, ce serait la rendre plus complaisante
vis-à-vis des dictatures et de l’islamisme qu’elle ne l’est déjà. Les
Etats-Unis incarnent encore la civilisation occidentale debout et, je
dois le dire, notre seule chance de rester debout nous-mêmes est de
travailler en synergie avec eux. Nous pouvons faire un autre choix,
bien sûr, et devenir un ensemble épiphénoménal et à demi éteint sur la
surface du monde…
LV: Qu’avez-vous à dire, sur la question de la Turquie, à ceux qui vous reprochent de faire le “jeu de l’Amérique contre l’Europe”?
GM: Je joue la vision planétaire des choses en une époque de
mondialisation accélérée. Je joue, dans cette vision planétaire la
carte de la Civilisation avec un grand C contre la carte myope et
étriquée d’une vision européo-européenne des choses. Je joue le jeu de
refuser le découplage entre les Etats-Unis et l’Europe, entre le bœuf
américain et la grenouille européenne qui voudrait se faire aussi
grosse que le bœuf, sans en avoir les capacités, les moyens ou même la
volonté.
L’une des bases de la stratégie est d’apprendre que se diviser est
faire le jeu de l’adversaire. Diviser la Civilisation, c’est faire le
jeu de la barbarie. Je laisse à ceux qu’atteint la myopie ou la
sénilité le soin de faire, sans savoir ce qu’ils font, le jeu de la
barbarie. Les combats du futur sont le combat pour une compatibilité
entre islam et démocratie, le combat pour la dissémination de la
Civilisation et le combat pour que la Chine évolue vers une
démocratisation et ne soit pas, dans le futur, une menace fasciste.
L’Europe est un combat d’hier, pas un combat du futur, et l’Europe
politique est une idée du siècle dernier: nous ne sommes plus à
l’époque des cartels pyramidaux, mais à l’époque du réseau et l’Europe
politique est un cartel pyramidal. Nous sommes à l’époque où il
n’existe plus que deux niveaux optimaux, le local et le global, le
local, c’est l’identité, et le global c’est le monde. L’Europe prétend
surpasser le local et effacer les identités pour se projeter dans
l’idée européenne, et ne voit pas le monde. La défense de l’Occident
existe, le grand marché existe, l’Europe politique est un archaïsme qui
ne verra pas le jour.
LV: Ne voyez-vous aucune contradiction, au regard de vos
positions sur l’Islam, à favoriser l’expansion de cette religion, dans
une Europe déjà passablement fragilisée sur ses bases sociologiques
traditionnelles?
GM: Encore une fois, je ne me situe pas au niveau européen. Je
ne «favorise» pas l’expansion de l’islam, je dis que l’islam est déjà
là et qu’il représente un milliard deux cent millions d’êtres humains
sur la terre. À l’échelle planétaire, il est crucial de faire entrer
l’islam dans la Civilisation. Si, obsédés par notre vision
européo-européenne, nous ne choisissons pas cette voie, si l’entrée de
l’islam dans la Civilisation ne devait pas se faire, l’Europe serait
peuplée d’un nombre croissant de musulmans touchés de façon croissante
par l’islamisme. Si l’islamisme reflue, l’Europe sera peuplée par un
nombre croissant de musulmans ancrés dans la Civilisation. Il y a deux
alternatives, il n’y en a pas d’autre: une Europe sans musulmans, cela
n‘existera pas. Une Europe peuplée de musulmans parmi lesquels des
islamistes s’activent, c’est déjà une réalité. Une Europe peuplée de
musulmans modérés et démocrates me semblerait une bonne option.
L’Europe, en matière d’islam, aurait à apprendre de l’islam turc tel
qu’incarné par des gens comme Fethullah Gulen ou Mustafa Akyol. Elle
aurait à apprendre aussi d’Ali al-Sistani. Je suis prêt à remplacer
l’UOIF par l’organisation de Gulen, immédiatement. De surcroît,
l’Europe vieillit, c’est un fait, elle devra faire appel à une
immigration massive ou se transformer en hospice de vieillards, c’est
un fait aussi, et il faut prendre ces faits en compte, et voir comment
on peut les prendre en compte de manière optimale.
LV: L’Amérique a-t-elle vraiment intérêt à long terme à
laisser l’Islam se renforcer en Europe? Ne risque-t-elle pas, à
protéger des intérêts à court terme, de voir face à elle un front
élargi? Quel serait alors son axe d’alliance stratégique?
GM: L’Amérique et l’Europe ont en commun l’intérêt de voir se
développer un islam modéré compatible avec la démocratie et de voir
refluer l’islam radical. L’Europe n’a aucun intérêt à faire preuve de
complaisance vis-à-vis de l’islam radical et des dictateurs du monde
arabe et, elle ne peut avoir la force de ne pas faire preuve de
complaisance, qu’en travaillant en synergie avec les Etats-Unis.
C’est l’Europe qui a une vision à court terme et qui semble incapable
de voir les enjeux planétaires à moyen terme. Pour le moment, c’est le
front français qui rétrécit. L’axe stratégique des Etats-Unis est la
coalition de tous les pays se reconnaissant dans la Civilisation. Une
majorité de pays d’Europe se reconnaissent dans la Civilisation au côté
de l’Amérique, l’Ukraine, l’essentiel de l’Europe centrale, le Japon,
l’Inde, l’Australie, l’Indonésie se reconnaissent dans la Civilisation
au côté de l’Amérique. La France pour le moment est dans le camp des
perdants, avec les dictateurs arabes et les islamistes. Elle a encore
l’alliance de l’Allemagne, mais que se passera-t-il si la CDU revient
au pouvoir ? La France devra choisir: ou l’alliance américaine ou
l’autre puissance montante, la Chine. Ceux qui, par antiaméricanisme,
rêvent déjà en France de voir la Chine supplanter rapidement et
aisément les Etats-Unis en tant que première puissance mondiale,
risquent de voir leurs rêves démentis. Ceux qui pensent que les
Etats-Unis sont isolés risquent de voir leurs pensées se fracasser
assez vite contre la réalité.
LV: Quelle est votre analyse sur la récente rencontre Bush
Sharon: s’agirait-il d’un lâchage d’Israël ou d’une réorientation de la
politique arabe des USA?
GM: La politique américaine est droite et constante. Elle suit
les lignes de la doctrine Bush et de la doctrine pour le grand
Moyen-Orient. Il n‘y a aucune réorientation. Il n’y a pas de lâchage
d’Israël. Aucun Président américain n’a été aussi favorable à Israël
que Bush. Bush est le président qui a exclu la question des réfugiés et
celle du retour aux frontières de 1967 de la table des négociations. Il
est le président qui a compris et accepté la construction de la
barrière de sécurité. Bush n’a jamais reçu Arafat et s’il a parlé
d’Etat palestinien à créer, a ajouté aussitôt que pour exister, cet
Etat devrait respecter la liberté de parole, les droits de l’homme,
fonctionner démocratiquement et connaître la liberté d’entreprise.
C’est une position très claire. Ce sont des conditions non-négociables.
L’Autorité Palestinienne pourra créer un Etat quand elle remplira les
conditions: la balle est dans son camp et Bush place la balle dans le
camp de l’Autorité Palestinienne avec beaucoup de bienveillance, mais
avec fermeté. Comme il faut en même temps montrer au monde arabe que
les Etats-Unis sont équitables, on prononcera des paroles fermes
vis-à-vis d’Israël. La situation n’en est pas moins, très exactement,
celle que je viens de décrire. Bush sait que la solution au «problème
palestinien» passe par la démocratisation du monde arabo-musulman et
qu’il faut se donner les moyens de cette démocratisation. Mais je le
répète, il n’y a aucun lâchage d’Israël, au contraire.
Pour ce qui concerne le retrait du Goush Katif, je suis très partagé:
c’est une décision de Sharon. Certains de mes amis néo-conservateurs y
sont favorables et pensent que cela s’intègre à une stratégie plus
vaste de «divorce» entre Israël et les populations arabes
palestiniennes, d’autres y sont farouchement opposés. Les deux courants
existent au sein de l’administration Bush. J’aurais tendance à penser
que ce n’est pas une bonne décision.
LV: Pourtant Bush ne dit-il pas en quelque sorte: “amis
arabes, je ne permettrai jamais que l’on touche à l’existence même
d’Israël, mais je suis seul à pouvoir limiter ses visées territoriales,
alors, donnant - donnant : faisons ami–ami et je ferai pression sur
Israël pour le retour aux frontières d’avant 1967 et je vous “donnerai”
Al Qods pour capitale de la Palestine. Le “gouvernement” palestinien ne
semblant pas disposé à mettre les groupes terroristes hors d’état de
nuire, ne pensez-vous finalement pas que la position d’Israël pourrait
devenir intenable et, de surcroît, militairement indéfendable. N’est-ce
pas, une nouvelle illustration d’une vision à court terme de l’Amérique
?
GM: Je pense que vous vous trompez totalement et je viens de
vous expliquer pourquoi. Je le redis: il n’est pas question pour Bush
d’un retour aux frontières de 1967, la question de Jérusalem n’a pas
été évoquée et Bush n’a jamais tenu les propos que vous lui prêtez. Il
ne fait pas «ami-ami» avec le monde arabe, mais soutient la vague de
démocratisation. Il ne se fait aucune illusion sur le gouvernement
palestinien. Il met en œuvre sa stratégie. La balle est dans le camp de
Mahmoud Abbas. Si Mahmoud Abbas ne saisit pas la balle, il administrera
lui-même… Le danger majeur serait la nucléarisation de l’Iran, et c’est
là, pour la région et pour la sécurité d’Israël le problème majeur
qu’il faudra régler. Sur ce dossier, à ma connaissance, les positions
américaines et israéliennes sont très proches. Pour ce qui est de la
vision à court terme, n’oubliez pas que c’est la France qui a misé sur
Saddam Hussein et sur Arafat, pas l’administration Bush.
LV: Les états arabes, surtout ceux qui disposent de ressources
pétrolières et gazières, courtisés aussi bien par les Etats-Unis que
par l’Europe (et sans doute bientôt par la Chine et l’Inde), disposent
désormais de moyens de pression considérables sur les Etats-Unis et sur
l’Europe. Cela ne met-il pas l’existence même d’Israël en péril?
GM: Non, les Etats arabes ne disposent pas de moyens de pression
considérables, surtout pas vis-à-vis des Etats-Unis. À court terme,
l’Irak aura retrouvé ses capacités de production et restera un allié de
l’Amérique. L’Amérique achète du pétrole en Amérique centrale, en
Afrique, en mer du Nord, en Asie centrale. L’Arabie Saoudite sait
qu’elle est sous surveillance étroite et que ses régions productrices
de pétrole sont peuplées de shiites et situées au Sud du Koweït. Le
seul grand producteur de pétrole à afficher une hostilité déclarée à
Israël et aux Etats-Unis est l’Iran. L’Europe est hostile à Israël,
mais ne représente rien militairement. La Chine dépend beaucoup plus du
pétrole du Proche-Orient que les Etats-Unis et n’aura pas avant
plusieurs décennies les moyens de s’opposer aux Etats-Unis. L’Inde est
alliée des Etats-Unis et se rapproche d’Israël. Israël est confronté à
des ennemis odieux et barbares et doit faire preuve de vigilance, mais
les Etats-Unis, surtout les Etats-Unis de George W Bush et du
néo-conservatisme, sont des alliés forts et indéfectibles d’Israël.
LV: Compte tenu de la croissance démographique des états
arabes, et de la puissance financière que leur procure l’exportation de
pétrole et de gaz, compte tenu aussi de ce que ces pays risquent d’être
pris en main par un fondamentalisme djihadiste, n’est-il pas
imprévoyant de la part des Etats-Unis et de l’Europe, de se livrer à
une compétition pour gagner les faveurs du monde arabe, leur production
de pétrole et leur marché, alors que ces pays, dopés par l’islamisme et
encouragés par les divisions du monde occidental, pourraient bientôt
jouer l’Europe contre les Etats-Unis et vice versa, en attendant de
désagréger l’un après l’autre?
GM: Le monde arabe n’a pas une immense puissance financière,
c’est une région sous-développée économiquement, culturellement et
politiquement. L’Europe est prête à s’accommoder de ce
sous-développement et prête aussi, dans le prolongement de la
«politique arabe de la France», à pratiquer l’apaisement vis-à-vis des
dictatures arabes et de l’islamisme. Les Etats-Unis entendent impulser
une politique de démocratisation du monde arabe et d’éradication de
l’islamisme. Je miserais plutôt sur la politique américaine: elle a
pour elle la lucidité et aussi la force permettant de mettre en œuvre
la lucidité.
LV: Ne voyez-vous pas une certaine incohérence de la
politique étrangère américaine? On soutient l’Inde, mais on livre des
armes sophistiquées aux Pakistanais, principaux disséminateurs de
technologie nucléaire vers le monde musulman... On ferme les yeux sur
les “dérapages” de Poutine en Tchétchénie pendant que Moscou “laisse
partir” des têtes nucléaires et des missiles de croisière vers
Téhéran... Têtes nucléaires que les Mollahs destinent le plus
officiellement du monde aux israéliens, alliés fidèles des USA. À ce
stade, est-il utile d’évoquer la lutte contre le terrorisme qui semble
inexplicablement épargner l’Arabie saoudite, principale bailleur de
fonds de tout ce que cette planète compte de fanatiques djihadistes?
GM: Il n’y a pas d’incohérence, mais le constat qu’on ne peut
régler magiquement et en un clin d’œil tous les problèmes du monde.
C’est avant Bush que les Etats-Unis ont fermé les yeux sur ce qui se
passait au Pakistan. Présentement, il faut renforcer les liens avec
l’Inde sans dénouer les liens avec le Pakistan. Il faut soutenir
transitoirement le général Musharaf plutôt que de risquer de voir
l’arme nucléaire pakistanaise passer aux mains de djihadistes.
Les Etats-Unis réprouvent la politique de Poutine et tout
particulièrement la fourniture de matériel nucléaire à l’Iran, mais
n’ont pas la possibilité concrète de s’y opposer. La guerre en
Tchétchénie est une guerre sale, mais il serait inconcevable de laisser
la Tchétchénie aux mains d’islamistes. Il faut se donner les moyens
d’arrimer la Russie à la Civilisation en sachant que c’est, là aussi,
un pays très malade. Poutine fait du commerce sans scrupule avec
l’Iran, mais il procède à un désarmement, il accepte des bases
américaines en Asie Centrale, il livre du pétrole aux Etats-Unis et au
Japon. La situation est très complexe et il faut y tracer une direction
optimale.
Le régime en place à Téhéran constitue sans doute le problème le plus
grave et le plus urgent, et on en a conscience aux Etats-Unis. L’Arabie
saoudite n’est pas épargnée: les Etats-Unis ont fait comprendre aux
dirigeants saoudiens qu’il fallait séparer le pétrole de l’islamisme et
du djihadisme, et cette politique est mise en œuvre en ce moment même….
Intervenir militairement en Arabie Saoudite serait impensable car
l’Arabie saoudite a sur son sol les lieux saints de l’islam, et les
djihadistes n’attendent que cela pour enclencher la guerre sainte de
tous les musulmans contre l’Occident. Il faut procéder autrement, avec
subtilité et intelligence, et on procède autrement. Il est regrettable
qu’on ne le voie pas en Europe et en particulier en France.
LV: Dans un article récent, paru sur le site de l’agence
de presse “Metula News Agency”, évoquant un procès vous ayant opposé au
MRAP, vous avez eu des mots très durs sur la France, sa presse et sa
justice. Pouvez-vous nous en parler? Etes-vous ce “raciste,
islamophobe, fasciste, incendiaire” décrit par cette association?
GM: Être islamophobe, c’est avoir peur de l’islam: je n’ai pas
peur de l’islam. Je n’ai pas non plus de haine pour l’islam: j’aime
tellement les musulmans que je veux leur intégration à la Civilisation
et que je souhaite que la bataille pour le cœur de l’islam soit
remportée par ceux qui, au sein de l’islam, respectent l’être humain et
la démocratie.
Le fascisme est un collectivisme totalitaire, comme le communisme, dont
le MRAP est fort proche. Je suis défenseur de la liberté individuelle,
de la démocratie et des droits de l’homme. Le racisme est la pratique
d’une discrimination entre les êtres humains en fonction de leur race:
sont racistes, à mes yeux, ceux qui pensent que les arabes seraient
incapables d’accéder à la démocratie et aux droits de l’homme et juste
bons à être gouvernés par des Saddam Hussein ou des Arafat. J’ai
discerné et je discerne toujours beaucoup de racisme et de mépris
envers les arabes chez ceux qui manifestaient en faveur de la dictature
exercée par Saddam sur les Irakiens et chez ceux qui manifestent en
faveur de la dictature exercée par les groupes terroristes
«palestiniens» sur les populations arabes de Cisjordanie et de Gaza. Je
discerne un mépris quasi-raciste chez ceux qui insultent ceux qui ont
un discours critique vis-à-vis de l’islam et qui semblent considérer
que les sociétés musulmanes sont juste bonnes pour le terrorisme ou
pour un archaïsme obscurantiste. Les incendiaires sont ceux qui posent
des bombes, s’inquiètent du racisme de manière non sélective, voient le
danger très précis incarné par le nouvel antisémitisme: de gauche,
tiers-mondiste, pro palestinien.
Le MRAP n’a plus rien à voir avec ce qu’il était: c’est une
organisation encore imprégnée de communisme, en un temps où le
communisme est partout ailleurs rangé au magasin des accessoires
sordides du passé, parmi les systèmes ayant pratiqué ou pratiquant le
crime contre l’humanité. C’est une organisation qui agit en faveur de
la montée du communautarisme musulman, tout en prétendant lutter contre
le communautarisme. C’est une organisation qui voit des islamophobes
partout et tout particulièrement chez les juifs, surtout s’ils sont
amis d’Israël, mais qui devient soudain aveugle quand se produisent des
agressions antijuives. C’est une organisation qui a enlevé le mot
antisémitisme de son appellation, comme pour montrer que
l’antisémitisme était devenu le cadet de ses soucis. Tout cela devrait
en toute logique porter un nom: imposture.
Je n’étais pas le seul à avoir porté plainte contre le MRAP: sur quatre
plaignants, il y avait l’actuel président de France-Israël,
Gilles-William Goldnadel, l’ancien président de France Israël, Michel
Darmon, et moi-même membre du comité directeur de France-Israël. À voir
et entendre la vindicte du MRAP, on aurait pu penser qu’il y avait un
grave péril raciste et fasciste en France et qu’il était incarné
essentiellement par France-Israël. Ce serait grotesque si ce n’était en
même temps très inquiétant. Il est plus inquiétant encore de voir un
procureur dans un tribunal parler comme si le droit de la presse et de
l’information s’arrêtait aux portes du tribunal concerné.
J’aimerais ne pas avoir le sentiment de vivre dans une société
pré-totalitaire. J’aimerais ne pas avoir à souhaiter que ce système
sclérotique qui asphyxie la France explose et que le souffle de la
liberté, qui touche d’autres régions du monde, vienne aussi souffler en
France et nous débarrasse de la pensée islamo-gaullo-gauchiste
ambiante. Il est inquiétant aussi de voir que la grande presse
française, à quelques exceptions près, comme Valeurs Actuelles et Le
spectacle du monde et de quelques autres journalistes, pratique la
pensée unique, est presque systématiquement anti-Bush, anti-américaine,
anti-israélienne, pro palestinienne, incapable de dire la vérité sur ce
qui se passe en Irak… Il y a quelques années, il était encore possible
de débattre en France: aujourd’hui, tout ce qui ne correspond pas aux
critères étroits de l’islamo-gaullo-gauchiste est impitoyablement
réduit au silence. L’avantage, en Union Soviétique, est qu’il y avait
une seule Pravda, alors qu’en France il y en a plusieurs, qui
prétendent au pluralisme. L’avantage en Union Soviétique, c’est que
personne ne pensait que la Pravda disait la vérité et incarnait la
moindre liberté de parole.
LV: Tant de haine contre vous de la part du MRAP... Vous semblez
avoir les qualités requises pour contribuer régulièrement à Liberty
Vox... En êtes-vous d’accord?
GM: Tout à fait. Je ferai ce qui m’est possible pour contribuer aussi régulièrement que possible à Liberty Vox.
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